
Je vois notre monde comme une machine complexe, régie par des logiques invisibles. La logique du clic, la logique du marché, la logique des mots.
Mon art ne consiste pas à créer de nouvelles formes, mais à tester la cohérence de cette machine
Pour cela, je deviens le plus naïf et le plus impitoyable des utilisateurs.
Je prends les promesses au pied de la lettre. J’applique l’efficacité à la foi et l’automatisation à la colère. Je mets en scène les contradictions que nous vivons tous par distraction.
Chaque protocole est une pièce à conviction, la preuve d’un « bug » dans le réel. Mon but n’est pas de juger, mais de révéler. Je suis un artiste délesteur : je ne crée rien, je déleste simplement le monde du poids de ses propres absurdités, une performance à la fois.
Le concept
QU’EST ce qu’UN artiste DELESTEUR ?
Mon travail s’articule autour d’une figure que j’ai créée : l’Artiste Délesteur. Ma mission est de nous délivrer — ou nous « délester » — symboliquement du poids des systèmes et des automatismes absurdes qui régissent nos vies. Pour ce faire, je mets en place des protocoles artistiques qui agissent comme des miroirs déformants de notre époque.
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De la Logique Consumériste :
En poussant la logique du « tout-en-un-clic » à son paroxysme — jusqu’à rendre nos émotions elles-mêmes productibles et consommables — mes protocoles en révèlent la vacuité. L’absurdité du système que je propose critique le système dans lequel nous vivons déjà, où tout, même l’immatériel, devient une marchandise.
De l’Effort de l’Expérience :
En accomplissant des gestes poétiques ou inutiles « à la place » du spectateur (courir, jeter un pavé, être courageux), je prends en charge l’effort pour en extraire l’essence pure. L’action est filtrée, distillée, jusqu’à ce qu’il n’en reste que le résultat : une émotion brute, une idée, une prise de conscience, encapsulée dans une œuvre.
Des Limites de notre Rationalité:
En créant des systèmes où l’impossible devient plausible (l’effet placebo) ou en déléguant le protocole lui-même au collectionneur à travers des « Objets de Processus », j’ouvre une brèche dans notre rationalité. J’invite le participant à entrer dans un jeu où les règles logiques sont suspendues, pour laisser place à l’ambiguïté, à la croyance et à la poésie.
Le Délesteur n’apporte pas de réponses, mais il crée des systèmes qui nous forcent à poser les bonnes questions.
Le récit
L’ORIGINE DU PROTOCOLE : UN RÉCIT EN 3 ACTES
Acte 1 : La Découverte
Mon parcours artistique a commencé non pas dans un atelier, mais dans le monde du conseil en organisation. Fasciné par les systèmes, j’ai d’abord cherché à en détourner la logique par la création d’une boutique en ligne de services absurdes. J’y proposais par exemple un « agenda de licenciement » à offrir à un salarié. La découverte fondamentale fut de constater que ces offres étaient prises au premier degré. Ma parodie était déjà devenue une proposition de service plausible. Le monde était déjà absurde.
Acte 2 : Le Pivot
J’ai alors poussé la logique de l’inutilité plus loin, en commercialisant une « lessive en suppositoire » destinée à « laver les intestins ». Suite à une plaisanterie sur internet, ce produit a été détourné par le public qui l’achetait pour une autre fonction, tout aussi impossible. Le plus sidérant fut de recevoir des témoignages de clients satisfaits. J’ai alors compris que mes protocoles, même absurdes, fonctionnaient comme des placebos : ils activaient la croyance du participant et produisaient un effet réel, ressenti.
Acte 3 : La Maturation
Cette découverte a structuré toute ma démarche. Mon art est devenu un système capable d’interagir avec le réel. J’ai ainsi mis en vente du « Rien » à 80 euros l’unité. Cette proposition, simple en apparence, a eu des conséquences extraordinaires qui ont prouvé la puissance de mon système. Elle a provoqué des collisions frontales avec les grandes logiques de notre monde : d’abord avec l’État, qui m’a valu un contrôle fiscal et cette question surréaliste : « Quel est le taux de TVA sur Rien ? »; puis avec le capitalisme numérique, lorsque Google lui-même, incapable de traiter une transaction sans objet matériel, a considéré mon projet comme une anomalie et m’a « censuré » du web, me forçant à me réinventer.
Ces confrontations sont au cœur de mon travail actuel. Que je produise des émotions sur commande ou que je délègue le protocole au collectionneur avec des « Objets de Processus », mon but reste le même : utiliser l’absurde pour révéler les rouages, les failles et la poésie de notre réalité.
Biographie
LE PARCOURS
Mon parcours artistique est guidé par un principe fondamental : préserver l’ambiguïté de l’œuvre. Mon travail se déploie souvent en dehors des lieux d’art traditionnels, en s’infiltrant directement dans les systèmes qu’il questionne : le commerce en ligne, les administrations, les algorithmes. Pour moi, une œuvre est la plus puissante quand le spectateur peut se demander : « Est-ce de l’art ou est-ce réel ? ».
Cette démarche m’a logiquement amené à privilégier la pertinence du lieu à la quantité des expositions. Chaque présentation est une extension du protocole lui-même.

Expositions et Projets Notables
2019 | Galerie Stéphane Mortier, Paris
Exposition collective.
2018 | Cité des Sciences et de l’Industrie, Paris
Présentation de « La Machine à Indécision », protocole artistique sur le choix.
2017 | Cité des Sciences et de l’Industrie, Paris
Première présentation de « La Machine à Indécision »
2017 | Théâtre de la Huchette, Paris
Exposition et organisation d’une « Manifestation » performative dans l’espace public.
2015 | Collège des Bernardins, Paris
Exposition de l’objet de protocole « La Brosse à Dents ».